Paul-Henri Mathieu dans le mouvement
LE CLAN et les supporteurs français se sont levés comme mus par des ressorts. Pendant que les Russes applaudissaient mollement et n'en croyaient pas leurs yeux. Paul-Henri Mathieu, ce joueur qu'ils s'étaient habitués à croquer avec une belle régularité, venait de battre leur numéro un en quatre sets, 2-6, 6-2, 6-1, 7-5.
Dans une salle dont les sièges de plastique multicolores ne parvenaient pas à dissimuler le faible nombre de spectateurs, Mathieu avait pourtant pris un début mitigé, face à un Davydenko à la solidité éprouvée. « Il m'a pris à la gorge et je l'ai un peu regardé jouer, explique le Français. J'ai eu le mérite de ne pas paniquer. Je sentais bien la balle ces derniers jours. Je savais que ça allait venir. »
Et alors que Mathieu avait réussi le break d'entrée dans la deuxième manche, le Russe apparut soudain apathique et désemparé. Il concéda sept jeux consécutifs et fut à un point de perdre le huitième. Lorsqu'il se reprit, la rencontre avait tourné, les crocs de Paul-Henri Mathieu étaient solidement plantés dans son mollet et le Français ne le lâcha plus. Même lorsque le Russe remonta de 4-2 à 4-5, l'Alsacien ne cilla pas et conclut sans trembler. « C'est une belle victoire, l'une de mes meilleures, concède l'intéressé. Mais ce n'est pas un exploit. Un exploit, ce serait de battre Federer à Wimbledon. »
Un historique traumatique
Peut-être pas un exploit, mais au moins la fin d'une série noire. Car si Paul-Henri Mathieu a beau répéter que tout cela est bien loin, l'association Coupe Davis et Russie ne se traduit pas forcément par joie et succès dans ses neurones. Mathieu possédant un historique particulièrement traumatique avec la Russie.
C'est à l'occasion de la finale à Bercy en 2002 contre les hommes de Tarpischev que l'Alsacien fut précipité dans la fosse aux lions par Guy Forget. Après s'être logiquement incliné devant un Marat Safin en état de grâce, Mathieu fut à deux points de donner - aux dépens de Mikhaïl Youzhny - son troisième saladier d'argent à la France en sept ans. Avant de s'incliner.
L'Alsacien mit d'autant plus longtemps à se remettre de ses émotions qu'il enchaîna les blessures pendant les deux ans et demi qui suivirent. Il se révéla ensuite un excellent joueur de Coupe Davis, notamment grâce à ses victoires contre Carlos Moya en demi-finale à Alicante en 2004. Mais ici en 2005, il perdit ses deux simples dans le quart de finale qui opposait déjà la Russie à la France, portant à quatre défaites pour zéro victoire, son bilan face à la désormais puissante Russie. La France perdit évidemment la rencontre.
Mais cette page du match Russie-Mathieu est désormais tournée et l'Alsacien se déclare prêt à disputer demain un éventuel match décisif contre Mikhaïl Youzhny. « Évidemment je suis prêt, sans cela je ne serais pas là », balaie-t-il, agacé. Car au-delà des mauvais souvenirs, le Strasbourgeois est dans une forme ascendante. Forme qu'il n'aurait pu imaginer il y a seulement deux mois et demi, lorsqu'au coeur de la nuit australienne, il se tordit sévèrement la cheville dans son match contre Fernando Verdasco. Alors qu'il était à quelques points de la qualification pour le deuxième tour. « Je ne pensais pas du tout à la Coupe Davis », avoue Mathieu, que sa vilaine entorse contraignit à six semaines d'arrêt.
De retour sur le circuit, le Français a réussi un beau parcours sur le ciment de Miami. Il a notamment accroché Fernando Gonzalez à son tableau de chasse avant de céder face à Andy Murray, non sans avoir obtenu des balles de match. Même si ce n'était pas facile de passer du ciment américain à cette piètre terre battue en salle, qu'il juge « humide et pleine de faux rebonds », Mathieu a relevé le défi. Montrant l'exemple à Richard Gasquet accrocheur et à l'équipe de France.
Source : Le figaro