Natation : Balmy impressionne

Championnats de France (petit bassin) à Angers. La Toulousaine a battu, hier, le record du monde du 200 m nage libre. Une nouvelle star est née.


Elle a un regard de velours, une voix douce, un sourire mutin, des réflexes de jeune fille discrète. Et la sensibilité d'une championne en devenir ayant encore du mal à accepter son statut. La veille, fatiguée par les éternelles questions sur Laure Manaudou, elle avait craqué. « Je nage les mêmes courses qu'elle, mais je suis Coralie Balmy. Posez-moi une question sur moi ! » La chatte s'était fait panthère. Avant de s'enfuir, les yeux remplis de larmes de colère.

Coralie chagrin, vendredi, Coralie bonheur, samedi. Appelez-la Madame Balmy, d'ailleurs. Une grande dame de 21 ans venant de claquer son premier record du monde, sur 200 m nage libre. Enterrée la précédente meilleure marque de l'Australienne Lisbeth Lenton (1'53''29). La référence désormais, c'est 1'53''18.

Son entraîneur :« Je laisse faire les choses »

Encore ruisselante, un zeste essoufflée, la nouvelle patronne la jouait modeste. Les nageurs ont décidément un peu du sang-froid des poissons. Un footballeur qui marque un but du genou peut faire trois fois le tour du terrain. Là, elle a levé la main, elle a souri et, salut Messieurs Dames. Dix mètres plus loin, c'était l'analyse à froid. Ni vraiment surprise, ni tout à fait transportée. « Contente, oui, on peut dire que je le suis. C'est une première pour moi, mais il en faut toujours une ».

Ses huit allers-retours ? « J'avais dans la tête le record de France et d'Europe (de Manaudou 1'53''48). Je me sentais bien, mais pas en train de faire un truc comme ça. Je savais que les autres allaient partir vite. Moi, je me suis dit : « Fais ta course comme tu sais faire ». Et puis j'ai accéléré. C'était dur. Mais je suis récompensée ».

Nous, à Pékin, on avait déjà misé sur elle. Non sans lui dire avant. « Ah bon ! Vous pensez que je peux faire une médaille », s'était à moitié étonnée la Martiniquaise de Toulouse. Eh bien, ça a failli ! Pour 8 petits centièmes, elle est restée au pied du podium du 400 m nage libre, après une course épatante, mais pas totalement aboutie, qui a longtemps hanté ses nuits. « J'ai tellement tourné ça dans ma tête que j'en ai marre. Je ne veux plus en parler ».

Lucien Lacoste, l'un de ses entraîneurs, le fait pour elle. « Elle était médaillée pendant une partie de la course aux Jeux et je peux comprendre sa douleur. Mais cette blessure l'a davantage boostée que freinée. Désormais, Coralie sait ce qu'elle veut, elle est en pleine possession de ses moyens et tout est simple avec elle. Je laisse faire les choses. Le petit bain ne la met pas vraiment en évidence. Elle est mieux en bassin de 50 m. Je suis intéressée de voir la suite ».

Vice-championne d'Europe du 400 m, double championne de France des 400 m et 800 m, le tout en grand bassin, Balmy n'avait encore jamais gagné le moindre titre en petit bain. C'est fait, depuis hier, avec ce 200 m nage libre brillamment exécuté. « Ce n'est qu'un temps, relativise Lacoste. C'est superbe, certes, mais les records sont faits pour être battus. Le plus important, ce sont les titres au bout des confrontations. Et puis, elle ne sera plus regardée pareil. Ce ne sera plus la fille qui arrive, mais celle qu'on va attendre ».

Vendredi, pour que cessent les éternelles comparaisons, elle avait lancé : « Je n'ai pas fait un dixième de ce qu'a accompli Manaudou ». Oui, mais là, le pourcentage n'est déjà plus le même. Et sa voie à elle, Coralie Balmy, est toute tracée.



Jean-Luc PELLIZZA.